Paul Keating a tort, voici pourquoi l’OTAN est importante pour l’Australie et l’Asie

La menace russe pour l’OTAN et la question de l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN sont restées les principaux sujets de discussion, mais le communiqué du sommet de Vilnius contenait également une focalisation considérablement élargie sur la Chine, la décrivant comme un « défi systémique » pour la sécurité euro-atlantique. Il précise que « les ambitions affichées et les politiques coercitives de la République populaire de Chine défient nos intérêts, notre sécurité et nos valeurs ».

Il a ensuite critiqué la Chine pour « des opérations hybrides et cyber malveillantes et sa rhétorique de confrontation et sa désinformation » et a accusé Pékin de s’efforcer « de renverser l’ordre international fondé sur des règles, y compris dans les domaines spatial, cyber et maritime ». Cela représente un durcissement significatif de la position sur la Chine.

L’importance de ceci est que si l’OTAN représente la fin belliciste de la pensée militaire et stratégique européenne et est généralement en avance sur la réflexion au sein de l’Union européenne, cette dernière rattrape généralement son retard. L’OTAN prépare essentiellement le terrain pour l’UE jusqu’à ce que la réalité la frappe enfin en plein visage.

L’opposition de la France à l’idée d’un bureau de liaison avec l’OTAN l’a mise en veilleuse pour l’instant. La réalité qu’un conflit dans le détroit de Taiwan aurait des effets désastreux sur la fortune économique de l’Europe en fait une idée qui finira par rester.

À son tour, le consensus croissant sur la Russie et la Chine entre l’OTAN et les démocraties développées en Asie – en particulier le Japon, la Corée du Sud et l’Australie – ouvre la voie à une plus grande collaboration et coordination sur la manière de contrer les activités malveillantes de ces deux pays de manière -appelé temps de paix. L’objectif serait de réduire la probabilité que les pays développés d’Europe ou d’Asie soient des maillons faibles à exploiter ou à contraindre militairement et économiquement.

Voilà donc où en sont les choses. Nous ne sommes pas près de voir la présence de navires de guerre britanniques ou français en Asie qui pourraient modifier l’équilibre des forces. Il n’y aura pas un nombre significatif de troupes européennes stationnées en Asie du Nord-Est. Mais la prise de conscience chinoise que les nations européennes ne fermeront pas les yeux sur tout recours chinois à la force à Taiwan ou ailleurs est remarquable.

Pékin ne peut pas se permettre de s’aliéner les démocraties avancées en Europe. Elle a encore besoin de leurs marchés, de leur financement, de leur technologie et de leur savoir-faire. Que l’OTAN, et progressivement l’UE, définissent le défi comme un groupe d’États autoritaires dirigé par la Chine et la Russie cherchant à contraindre et finalement à éclipser les démocraties est un énorme problème pour Pékin.

Gardez à l’esprit que les Européens ne parlent pas aussi instamment de dissuader la Chine que les Américains, les Japonais ou les Australiens ont tendance à le faire, mais le sommet montre que l’Europe commence à penser en des termes similaires. Nous ne savons pas ce que l’OTAN ou les différents pays européens feraient en cas de crise à Taiwan. La Chine non plus. Mais les Chinois sauront désormais que l’Europe ne restera pas indifférente à un tel scénario comme Pékin l’espérait autrefois.

Personne n’avait prédit la force avec laquelle l’Europe a réagi à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Et étant donné que la dissuasion n’est pas simplement militaire, plus l’incertitude de la Chine quant aux conséquences involontaires de l’utilisation de la force est grande, mieux c’est.

La Chine gagne si elle peut diviser pour régner. Keating a peut-être manqué l’importance de ce qui s’est passé la semaine dernière, mais pas Xi Jinping, à en juger par les efforts de ses responsables pour condamner toute empreinte de l’OTAN en Asie. Cela en a fait une bonne semaine pour les démocraties libérales.

Le Dr Lavina Lee est aussimaître de conférences au Ddépartement d’études de sécurité et de criminologie de l’Université Macquarie.